Critique - Jeune Public - Villeneuve d'Ascq (Lille)
Si je te mens, tu m'aimes ?
Devenir et être adulte
Par Michel VOITURIER
Lola et Théo, 9 ans, se rencontrent à l'école. Elle est nouvelle. Il est déjà ancré dans le lieu. Tous deux sont enfants de couples qui connaissent la séparation. Lui, il rêve d’être rappeur ; elle, brinqueballée d’école en école, espère entrer en relation pour combler ses manques affectifs. Et ce sera en quelque sorte un coup de foudre pour le gamin.
Ce duo est dans son monde, dans sa quête d’une vie autre, dans ses affrontements avec les adultes, dans les troubles du désir de l’adolescence. Le texte d’Evans ne raconte pas cette histoire de manière linéaire. Il aime passer du présent au passé, d’un lieu à un autre, des protagonistes aux deux interprètes qui les incarnent, du récit descriptif au dialogue dans l’action, et même de la difficulté qu’éprouve l’auteur à écrire cette histoire.
Il aborde de la sorte une série de problèmes. Celui de la famille d’abord à travers les différends entre les parents, les conflits avec la génération des enfants, leur malaise devant des couples un peu chaotiques. Mais aussi l’inégalité entre femmes et hommes, les filles trop tôt enceintes, le rôle de l’école, le compagnonnage avec un animal domestique, la difficulté à garder un secret, les malentendus entre les gens ordinaires à cause de leur dépit ou de leur précarité.
Justement, les adultes n’ont pas trop envie que les deux enfants se fréquentent. Alors, ça dégénère vite. Les injures fusent à propos des parents des deux. Et le père de Lola finit par menacer Théo s’il continue à harceler sa fille. Alors, par crainte, Théo vient en classe avec un couteau, pour se défendre le cas où. Alors, scandale et perplexité en ces temps de terrorisme latent.
Les rêves s’effritent. Théo est exclu ; Lola partira une fois de plus vers une nouvelle école. Des êtres se quittent, d’autres se retrouvent. Chacun deviendra adulte avec ses souvenirs d’enfance. Devant un tableau noir sur lequel la craie a tracé signes et mots, la pièce dans laquelle Noémie Gantier et Maxence Vandevelde ont interprété avec pétulance tous les rôles, y compris celui du chien, s’arrête, laissant chacun réfléchir à son présent, imaginer son avenir.
Source : www.ruedutheatre.eu Suivez-nous sur twitter : @ruedutheatre et facebook : facebook.com/ruedutheatre