Dynamisme et inventivité sont sans doute les deux mots qui conviennent à ce spectacle de marionnettes et de musiques. D’un côté, celui du jardin, un musicien virtuose, capable de jouer en même temps de la clarinette, de l’accordéon et de la batterie, mène presto mélodies gaillardes et boniment de forain. De l’autre côté et au milieu du plateau, une comédienne marionnettiste danseuse entraine une sarabande biographique en un train d’enfer qui part du présent vers le passé pour mieux revenir à un présent définitif.
Martin Kaspar Läuchli donne le rythme et les tons. Il cavale à travers des airs guillerets, des bruitages de décor sonore, des élans dramatiques, des intermèdes ironiques. Simultanément et mine de rien, il tire quelques ficelles qui déclenchent des éléments scéniques.
Estelle Charlier joue de son corps comme d’un instrument omniprésent qui connaît le mime, qui s’incarne en chorégraphies, qui ose les contorsions de l’acrobate, qui se déglingue en pantin effrayant ou déclame en moribonde bien vivante un inventaire vital.
Elle manipule des marionnettes expressionnistes de toutes sortes. À fils, à gaine, à porter, à propulser, à se projeter en ombres chinoises. Elle se masque et démasque des épisodes biographiques. Elle donne des voix, parfois rendues inaudibles par un visage emprunté au cauchemar et à la légende ou à la mythologie.
Rien n’échappe à ce torrent verbal, gestuel, musical. De l'accouchement initial à l’agonie finale, c’est un défilé expéditif dont la partie la plus ahurissante et la plus spectaculaire est un ballet entre des projections sur une feuille de papier maniée comme accessoire de ballet et permettant des apparitions, des métamorphoses, des sortilèges vertigineux. Un moment anthologique dont on comprend que la troupe ait pris le risque d’en abuser au point de déséquilibrer quelque peu le déroulement de l’histoire.
On sort de là pantelants, comme les interprètes. Et il faut un temps de décompression pour revenir au quotidien en sa banalité si souvent morne. On emporte des images, on retrouve des bribes de la mémoire collective nourrie par des mythologies cosmopolites.
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