A la crise sanitaire et à la déprime générale qui s’ensuit, le Théâtre de l’Atelier répond par une volée de pièces comiques. Avec des soirées en deux temps. D’abord, On Purge Bébé, comédie déjantée de Georges Feydeau. Ensuite, plus inattendu, Crises de nerfs, trois courtes pièces comiques de Tchekhov enchainées et servies par deux vétérans de la scène : Peter Stein pour la mise en scène et Jacques Weber pour l’interprétation. Compte tenu des dernières dispositions prises par le gouvernement sur le Covid 19 et des horaires du couvre-feu, les séances en matinée et en fin d'après-midi ont remplacé celles des soirées (consulter le site internet du théâtre ci-contre).
On a vu On purge bébé et constaté avec surprise que la metteure en Scène, Emeline Bayart, qui est aussi l’interprète principale, a introduit dans le déroulement de l’action (particulièrement échevelée) des parties chantées. Des petits bijoux de la chanson française, écrits du temps de Feydeau (1862-1921), soit ce qu'on a appelé la Belle Époque. Elle rétablit ainsi l’usage des couplets chantés dans les vaudevilles qui, précise-t-elle dans le programme, s’est perdu depuis 1864 (pourquoi cette date ? mystère). Ces chansons que l’actrice, qui fut aussi cantatrice (à l’Opéra Comique notamment), interprète elle-même ou confie aux autres comédiens, sont souvent très lestes, comme «ça ne vaut pas La Tour Eiffel ! » ou encore « le fiacre ». Accompagnés au piano, ces airs plus moins connus sont censés révéler l’inconscient des personnages, traduire : dire tout ce qu’ils ne disent pas.
Couple pathologique
Sur fond de panorama emblématique du Paris des comédies musicales américaines des années cinquante (façon « Un Américain à Paris ») se règlent les comptes du couple pathologique, en perpétuelle scène de de ménage, formé par Madame Follavoine (Emeline Bayart, vibrionnante) et Monsieur (Eric Prat, qui ne l’est pas moins). Cette fois, l’objet du litige, c’est le refus de leur impossible garnement prénommé Toto, alias Bébé, constipé chronique, de prendre sa purge. Là-dessus déboule Monsieur Chouilloux (Manuel Le Lièvre, hilarant), haut-fonctionnaire qui a pour mission de commander des pots de chambre pour l’armée française. Ça tombe bien car Follavoine détient le brevet de la porcelaine (prétendument) incassable. Pour emporter le morceau, celui-ci a donc invité Chouilloux, cocu notoire, à déjeuner...
Bien sûr les pots de chambre incassables vont se casser, les répliques fuser et les portes claquer au-delà du raisonnable. Contre toute attente, le couple Follavoine va tenir bon car c’est Monsieur Chouilloux qui va être le dindon de cette farce tordante menée tambour battant par toute la troupe en grande forme.