Art contemporain, théâtre, cirque, danse... il y a un peu de tout cela dans la performance/spectacle de Phia Ménard. Cette dernière création avec sa compagnie Non Nova est partie d’un projet pour la Documenta de Kassel en 2016 avec pour thème « Apprendre d’Athènes », « Pour un parlement des Corps ». C’est le premier volet d’une trilogie intitulée Contes Immoraux qui met aux prises l’identité, le corps, la matière. Pas de morale, encore moins de didactisme dans sa démarche mais un pont, un grand écart ou un raccourci spatio-temporel entre Kassel, ville allemande détruite sous un tapis de bombes à la fin de la seconde guerre mondiale, puis reconstruite par le Plan Marshall, et Athènes, en proie à la crise financière.
Telle une superwoman toute de cuir (dé)vêtue, Phia Ménard apparaît masquée sur la scène des Bouffes du Nord. Sorte de Walkyrie post-moderne, elle s’emploie à relever une grande surface de carton prédécoupé qui gît au sol et constitue les parois de la maison qu’elle s’apprête à édifier. Infatigable, telle une Sisyphe au féminin, elle s’échine à assembler les différents morceaux, à les accoler, les ajuster ensemble grâce à des mètres d’adhésif qu’elle dispose à la va-vite, avec une énergie qui tient de la rage, comme aiguillonnée par la bande-son qui capte in vivo les bruits de l’opération et les restitue en musique concrète.
Temple grec
Peu à peu, au prix de grands efforts physiques et d’échecs répétés qui prennent l’apparence d’un ballet, on se laisse prendre au jeu et la maison prend forme. Quand elle est enfin sur pied on s’aperçoit que c’est un temple grec qu’elle a construit, avec ses colonnes régulières découpées en un temps record à la tronçonneuse.
Mais on n’a pas le temps d’admirer le résultat qu’une pluie fine commence à tomber des cintres, une pluie pénétrante qui imprègne petit à petit la construction et qui évolue en trombes d’eau. Le bâtiment finit par s'affaisser et s’efondrer par pans entiers. Tout disparait dans les nuages de poussière de la destruction. Et tout reste à reconstruire !