Toujours à l’affût de curiosités lyriques, le Théâtre de l’Athénée accueille pour la première fois en France l’opéra-comique créé en 2013 par Gerald Barry sur la pièce fameuse d’Oscar Wilde The Importance of being Earnest (en français : L’Importance d’être Constant). Complètement loufoque, l’opéra-comique en trois actes (surtitré en français) qu'il en a tiré est interprété par les joyeux drilles de la troupe d’Opéra Louise, basée à Fribourg, en Suisse, celle-là même qui a donné l’an dernier à l’Athénée la comédie musicale de Chostakovitch « Moscou, quartier des cerises »,.
Cette fois, il s’agit bien d’un opéra-comique tant la musique composée en 2010 par Gerald Barry se réfère aux compositeurs de musique dite sérieuse, de Beethoven à Schönberg en passant par Ligeti. Le compositeur a lui-même retravaillé la pièce d’Oscar Wilde pour en faire saillir les moments forts, musicalement les mieux exploitables, si bien que la partition épouse étroitement les tempi de l’intrigue boulevardière avec ses coups de théâtre et ses retournements. « Comédie frivole pour gens sérieux », selon les mots d’Oscar Wilde, The importance of being earnest (1894) repose tout entière sur les quiproquos nés de l’homonymie en anglais entre le prénom Earnest et l’adjectif signifiant sérieux, constant.
Bonbons acidulés
Fourmillant de traits d’esprit, de nonsenses et de paradoxes au parfum de scandale qui électrisent l’Angleterre corsetée de la reine Victoria, la pièce, pétillante à l’envi, conte les mésaventures désopilantes de deux péronnelles, Cecily et Gwendoline, qui s’amourachent de garçons qui mènent des doubles vies et se font tous deux appeler Earnest. Le tout sous le regard courroucé d’une mégère anticonformiste, Lady Bracknell - rôle d’autant plus drôle qu’il est tenu ici par un travesti - et d’une préceptrice, Miss Prism, férue de grammaire allemande !
Avec ses décors et costumes aux couleurs de bonbons acidulés, le spectacle baigne dans un atmosphère seventies, pop arty à la Warhol. Très enlevée, cultivant l’humour à base de dissonances, la partition exécutée par l’Orchestre de chambre Fribourgeois use (et abuse parfois) d’effets musicaux orchestraux qu’on pourrait qualifier de stroboscopiques, avec des instruments sous tension s’arrêtant sur tel ou tel passage pour en démultiplier le potentiel comique. De bon niveau, les chanteurs font preuve d’un bel enthousiasme sans pour autant se prendre au sérieux.