Pour rappel: tgSTAN [= toneel group S(top) T(hinking) A(bout) N(ames)] ou un atypique Groupe de Théâtre qui revendique une sorte d'anonymat de ses membres, de leurs fonctions... Le jeu d'acteur est au premier plan. Pas de metteur en scène attitré, rien que des comédiens qui se sont rencontrés étudiants et ont décidé de continuer ensemble un parcours de création professionnelle.
Cela fait une bonne vingtaine d'années déjà que l'on a l'occasion de suivre son itinérance car c'est encore une de ses caractéristiques : un calendrier qui le propulse à tous les coins du globe. Le tgSTAN présente des spectacles autant en français, qu’en néerlandais ou en anglais.
Le voilà de retour à Bruxelles, et pour ce "Focus tgSTAN, tout en français" ce sont: "Scènes de la vie conjugale" et "Après la répétition" au Théâtre Les Tanneurs ainsi que "Trahisons" de Pinter, au KVS Box et "My dinner with André" d'après Louis Malle, au KVS Bol, soit quatre de leurs succès qui ont connu une tournée internationale.
Il y eut déjà un Focus, au KVS et au Théâtre National, dans le cadre, aussi, des échanges de"Toernee General". Intitulé:"Trois fois tgSTAN", il impliquait plusieurs des acteurs habituels et davantage de moyens que cette fois où il s'agit d'une exploration plus intime, notamment de l'univers d'Ingmar Bergman, au théâtre francophone des Tanneurs.
On retrouve Franck Vercruyssen (pilier de tgSTAN) avec deux partenaires: Ruth Vega Fernandez et Georgia Scalliet pour respectivement "Scènes de la vie conjugale" (1973) et "Après la répétition" (téléfilm de 1984). Les deux pièces ont pour points communs les relations hommes-femmes, et de n'avoir pas été écrites pour la scène par Bergman mais pour le grand et le petit écrans.
Un théâtre qui se joue du théâtre
Le 'pitch' est simple: un metteur en scène vieillissant, Henrik Vogler/Franck Vercruyssen, a engagé une jeune comédienne Anna Egerman/Georgia Scalliet, pour une pièce qu'il connait bien, "Le Songe" de Strindberg, qu'il a montée plus d'une fois. La comédienne de 23 ans n'est autre que l'enfant d'une amante passée, Rakel, comédienne elle aussi, maintenant décédée et qui joua le même personnage que sa fille à présent.
Alors qu'elle s'en allait, Anna est revenue sur ses pas sous le prétexte de retrouver un bracelet prétendument oublié. Henrik est seul. Ils vont avoir un entretien animé alors qu'ils font une pause avant la Première proche. Il y sera question du travail en cours, de théâtre en général et des rapports de force, de tension, de charme entre actrice et metteur en scène, mais de choses beaucoup plus personnelles également.
Réalité et imaginaire, présent et passé vont se placer sur le même plan, et les "mises en abyme" prévues par l'auteur vont jusqu'à faire se mélanger la fiction et l'authentique. Le fait que Georgia Scalliet soit à la fois Anna et Rakel ajoute une touche au vertige de ces mises en abyme et une délicieuse ambigüité...
Même si l'on ne peut nier la justesse de l'analyse des sentiments complexes qui agitent les personnages, l'intérêt principal, qui fera que le spectateur sera accroché de bout en bout, réside dans le jeu des comédiens, au plus près de lui. Il ne sera pas déçu ! Ces deux grands acteurs sont confondants de naturel. Ils rendent bien perminente la déclaration de Bergman par le truchement de Vogler: "On a besoin de rien d’autre pour que le miracle du théâtre se produise qu’un texte, un acteur et un spectateur."